ISSN 2369-3045
Avant-propos
Marie Carrière
Médée, mythe de l’événement
[ezcol_1third]Marie Carrière est professeure de littérature à l’Université de l’Alberta où elle dirige aussi le Centre de littérature canadienne. Elle a publié plusieurs études dans les domaines de la pensée féministe et de la littérature contemporaine incluant les monographies, ¬Médée protéiforme (Presses de l’Université d’Ottawa) et Writing in the Feminine in French and English Canada : A Question of Ethics (University of Toronto Press), ainsi que l’ouvrage collectif, avec Patricia Demers, Régénérations : Écriture des femmes au Canada (University of Alberta Press).
Études
Anna Kalyvi
Médée sangulière. Artiste / création : un infanticide ?
[ezcol_1third]Artiste-chorégraphe et titulaire du master Erasmus Mundus Cultures Littéraires européennes, Anna Kalyvi prépare actuellement sa thèse « Médée illymytée. Du mythe en scène (théâtre et danse) aux XXe et XXIe siècles » (dir. Jean Marc Lachaud. Arts Plastiques et sciences de l’Art, Paris I-Panthéon-Sorbonne). En Octobre 2014, elle a participé au colloque international « Théâtralité(s) » de l’Université de Strasbourg (« La théâtralité en mouvement. Du texte à la scène-de la scène au texte. Medea de Pascal Quignard dansée par Carlotta Ikeda »).
Durant ces dernières décennies, le mythe de la redoutable magicienne de l’Antiquité grecque qui a tué ses enfants pour se venger de son mari a été particulièrement vivant. Dans cet esprit de modernité, Médée est éclairée par les artistes chorégraphiques contemporains, devenant pour eux une source illimitée d’inspiration. Si chaque Médée est ensanglantée, c’est-à-dire associée à l’infanticide que sa réputation lui connaît, chacune d’elle est également singulière puisque chaque artiste envisage et représente le mythe à sa façon. Quel écart présentent les chorégraphies contemporaines par rapport à l’archétype et quel lien allégorique pourrons-nous établir entre Médée et l’enfant, entre l’artiste et la création ? Nous allons aborder ces questions à travers les chorégraphies et les témoignages personnels de trois créateurs contemporains : Dimitris Papaioannou, Renato Zanella et Angelin Preljocaj.
In the last decades, the myth of Medea has been resurfacing frequently. In this spirit of modernity, the formidable sorceress of the Greek antiquity, who murdered her children to take vengeance on her husband, has been persistently portrayed by choreographers, for whom she has become an unlimited source of inspiration. If each Medea is considered bloody (always associated with the infanticide for which she is infamous), each one of them is also unique, since each artist represents the myth in his own way. What degree of distortion do modern choreographies present compared to Euripides’ version? By what means is this distortion represented on the artistic level? Finally, what allegory lies between Medea and child, and artist and production? We will examine these questions by comparing the creations of three contemporary choreographers: Dimitris Papaioannou, Renato Zanella and Angelin Preljocaj.
Ingeborg Rabenstein-Michel
Normes sociétales et discours littéraires : le « cas Médée » ou le motif de la mère infanticide dans la littérature germanophone
[ezcol_1third]Auteure[/ezcol_1third] [ezcol_1third]Résumé[/ezcol_1third] [ezcol_1third_end]Abstract[/ezcol_1third_end]
Germaniste de formation, Ingeborg Rabenstein-Michel est maîtresse de conférences à l’Université Claude Bernard – Lyon 1. Directrice du Centre de Langues de l’UCBL, elle est aussi membre du Centre de recherche LCE (Langue et cultures européennes/EA 1853-Lyon 2) où elle dirige un axe consacré au genre (Féminin-masculin dans une dialectique du déplacement : évolutions, interactions et perspectives dans les champs artistiques). Ses enseignements comprennent les cours pour germanistes spécialistes, un séminaire consacré à l’International, ainsi que des modules genre dans le cadre du Centre Louise Labé (Université Lumière-Lyon 2) et dans la formation des futurs enseignant-e-s des premier et second cycles. Elle a collaboré au Dictionnaire des femmes créatrices, dans la section « Littérature/Allemagne – Autriche – Pays de langues germaniques ». Ses recherches portent sur les rapports entre littérature et mémoire, sur les écritures autobiographiques féminines, les transpositions fictionnelles du XIXe au XXe siècles) et, récemment sur la bande dessinée de langue allemande.
Médée est triplement barbare en tant que non-grecque, donc non-civilisée, en tant que magicienne et traitresse de son peuple, et en tant que vengeresse meurtrière et infanticide. C’est cette dernière représentation de Médée en mère monstrueuse défiant les normes sociétales et humaines qui nous intéressera ici : en transgressant le rôle fixé et prescrit par un patriarcat soucieux de préserver des prérogatives plus ou moins légitimes, elle porte atteinte aux autorités qui la gouvernent, mari, famille, société, État. L’analyse d’un choix d’œuvres montre comment la littérature de langue allemande a su, de manière continue, non seulement représenter mais aussi prendre à contre-pied des discours législatifs, médicaux et moraux normatifs entièrement centrés sur la nécessité de punir pour donner l’exemple. Au moment où Kant avance une thèse audacieuse pour inviter à changer le regard, ne serait-ce que juridique, qu’on pose sur la « mauvaise mère », le plus souvent victime plus que criminelle, des auteurs majeurs (Bürger, Schiller, Goethe) souvent juristes de formation et témoins et/ou jurés dans des procès d’infanticide créent des archétypes et scenarii que reprennent en les adaptant les écrivains des siècles suivants (Brecht, Struck, Turrini, Vanderbeke). Du crime à la pathologie, de l’aliénation à l’inadaptation, du pénal au social, le « cas Médée » suscite, jusqu’à nos jours, une interrogation vive sur le comportement « hors-normes » de ces nouvelles barbares dorénavant plus étrangères à elles-mêmes qu’à la civilisation qui avait jadis servi de prétexte pour exclure Médée.
Medea, a savage three times over: as non-Greek therefore non-civilised, as a magician and traitor to her people, as a murderous and infanticidal avenger. It is this latter representation of Medea as a monstrous mother defying all societal and human standards that interests us here. By transgressing the role fixed and prescribed by a patriarchy concerned about preserving more or less legitimate prerogatives, she violates the authorities that govern her: husband, family, society, State.
By analysing a selection of works, we can see how the literature written in German was continuously able not only to represent but also to take the opposing view of normative legislative, medical and moral discourses which were completely centered on the need to punish as an example. As soon as Kant put forward an audacious theory to attempt to change at least the legal perspective of the “bad mother”, more often a victim than a criminal, major authors (Bürger, Schiller, Goethe), often legal experts and witnesses and/or jurors during infanticide trials, created archetypes and storylines that were taken up and adapted by writers of the following centuries. Brecht, Struck, Turrini, Vanderbeke and many others dealt with the theme afterwards. From crime to pathology, from alienation to maladjusment, from penal to social, the “Medea case” even today stimulates sharp questioning of the “nonstandard” behaviour of these new savages stranger to themselves than to the civilisation that once served as a pretext to exclude Medea.
Germaniste de formation, Ingeborg Rabenstein-Michel est maîtresse de conférences à l’Université Claude Bernard – Lyon 1. Directrice du Centre de Langues de l’UCBL, elle est aussi membre du Centre de recherche LCE (Langue et cultures européennes/EA 1853-Lyon 2) où elle dirige un axe consacré au genre (Féminin-masculin dans une dialectique du déplacement : évolutions, interactions et perspectives dans les champs artistiques). Ses enseignements comprennent les cours pour germanistes spécialistes, un séminaire consacré à l’International, ainsi que des modules genre dans le cadre du Centre Louise Labé (Université Lumière-Lyon 2) et dans la formation des futurs enseignant-e-s des premier et second cycles. Elle a collaboré au Dictionnaire des femmes créatrices, dans la section « Littérature/Allemagne – Autriche – Pays de langues germaniques ». Ses recherches portent sur les rapports entre littérature et mémoire, sur les écritures autobiographiques féminines, les transpositions fictionnelles du XIXe au XXe siècles) et, récemment sur la bande dessinée de langue allemande.
Médée est triplement barbare en tant que non-grecque, donc non-civilisée, en tant que magicienne et traitresse de son peuple, et en tant que vengeresse meurtrière et infanticide. C’est cette dernière représentation de Médée en mère monstrueuse défiant les normes sociétales et humaines qui nous intéressera ici : en transgressant le rôle fixé et prescrit par un patriarcat soucieux de préserver des prérogatives plus ou moins légitimes, elle porte atteinte aux autorités qui la gouvernent, mari, famille, société, État. L’analyse d’un choix d’œuvres montre comment la littérature de langue allemande a su, de manière continue, non seulement représenter mais aussi prendre à contre-pied des discours législatifs, médicaux et moraux normatifs entièrement centrés sur la nécessité de punir pour donner l’exemple. Au moment où Kant avance une thèse audacieuse pour inviter à changer le regard, ne serait-ce que juridique, qu’on pose sur la « mauvaise mère », le plus souvent victime plus que criminelle, des auteurs majeurs (Bürger, Schiller, Goethe) souvent juristes de formation et témoins et/ou jurés dans des procès d’infanticide créent des archétypes et scenarii que reprennent en les adaptant les écrivains des siècles suivants (Brecht, Struck, Turrini, Vanderbeke). Du crime à la pathologie, de l’aliénation à l’inadaptation, du pénal au social, le « cas Médée » suscite, jusqu’à nos jours, une interrogation vive sur le comportement « hors-normes » de ces nouvelles barbares dorénavant plus étrangères à elles-mêmes qu’à la civilisation qui avait jadis servi de prétexte pour exclure Médée.
Medea, a savage three times over: as non-Greek therefore non-civilised, as a magician and traitor to her people, as a murderous and infanticidal avenger. It is this latter representation of Medea as a monstrous mother defying all societal and human standards that interests us here. By transgressing the role fixed and prescribed by a patriarchy concerned about preserving more or less legitimate prerogatives, she violates the authorities that govern her: husband, family, society, State.
By analysing a selection of works, we can see how the literature written in German was continuously able not only to represent but also to take the opposing view of normative legislative, medical and moral discourses which were completely centered on the need to punish as an example. As soon as Kant put forward an audacious theory to attempt to change at least the legal perspective of the “bad mother”, more often a victim than a criminal, major authors (Bürger, Schiller, Goethe), often legal experts and witnesses and/or jurors during infanticide trials, created archetypes and storylines that were taken up and adapted by writers of the following centuries. Brecht, Struck, Turrini, Vanderbeke and many others dealt with the theme afterwards. From crime to pathology, from alienation to maladjusment, from penal to social, the “Medea case” even today stimulates sharp questioning of the “nonstandard” behaviour of these new savages stranger to themselves than to the civilisation that once served as a pretext to exclude Medea.
Viktoria Adam et Kathrin Winter
Medea erfindet sich selbst. Aktualisierungsstrategien eines Mythos bei Seneca und Dario Fo / Franca Rame
[ezcol_1third]
Viktoria Adam est depuis 2008 enseignant-chercheur au département de philologie romane à l’université de Heidelberg où elle enseigne la littérature italienne. Elle s’intéresse notamment à la littérature transculturelle, aux études de genres et à la littérature européenne du XIXe siècle. Sa thèse, intitulée Der lunatische Roman und die Poetik der Ambivalenz. Narratologische Untersuchungen zum Romanwerk Ermanno Cavazzoni (Le roman lunatique et la poétique d’ambivalence) a été publiée en janvier 2014.
Kathrin Winter est depuis 2009 enseignant-chercheur au département de philologie classique à l’université de Heidelberg. Ses recherches actuelles portent sur la tragédie romaine, la poésie néronienne et augustienne ainsi que la conception de l’espace dans la littérature latine. En 2014 a été publiée sa thèse Artificia Mali. Das Böse als Kunstwerk in Senecas Rachetragödien (Artificia Mali. Le mal comme œuvre d’art dans les tragédies de vengeance de Sénèque).
La contribution se concentre sur deux versions du mythe de Médée : l’analyse de Medea de Sénèque et de La Medea de Dario Fo/Franca Rame montrera comment le personnage de Médée se réinvente et s’actualise pendant le processus de réflexion qui le porte jusqu’à l’infanticide. La comparaison du texte antique avec le texte moderne éclairera les différentes facettes de ce développement fatal ainsi que les diverses stratégies d’actualisation employées dans les œuvres de Sénèque et de Fo/Rame.
This paper focuses on two dramatic versions of the myth of Medea: Seneca’s Medea and La Medea by Dario Fo/Franca Rame. We will demonstrate that both plays present Medea as a mythological figure who, by the means of a complex process of (self-)reflection, comes to the fatal decision to commit infanticide. By doing so, she forges her own identity and also recreates Medea in front of the audience. The comparison between the ancient and the modern text will explore the unique and yet recurring development of Medea as well as the strategies of renewal used by Seneca and Fo/Rame.
Pascale Joubi
La trace de Médée dans Le cimetière des poupées de Mazarine Pingeot
[ezcol_1third]
Détentrice d’une maîtrise en littératures de langue française (Université de Montréal), Pascale Joubi a rédigé, en 2014, un mémoire portant sur le mythe et le monstre dans l’œuvre de Nelly Arcan. Elle prépare une thèse de doctorat sur la palingénésie de la figure de l’Amazone dans les œuvres littéraires et picturales des XXe et XXIe siècles. Elle a publié des articles et fait des communications portant sur des réécritures de Méduse, de Médée, de Pygmalion et Galatée, sur la représentation du gender dans les nouvelles de Renée Vivien et sur la figure de la jeune fille au début du XXe siècle.
Au cœur du mythe de Médée se trouve la volonté d’une femme d’affirmer haut et fort son statut de sujet. L’article tentera de montrer que cette quête identitaire constitue le motif de l’acte infanticide que commet la narratrice du Cimetière des poupées (2007) de Mazarine Pingeot. Dans ce roman français, la protagoniste, en prison, écrit une lettre à son mari pour lui raconter son crime et lui en expliquer les raisons. Ce récit devient alors prétexte à la récupération de son identité : étant depuis l’enfance objet du discours des autres, elle reprend à son compte leur manière de la définir et l’assume pour affirmer son existence en tant que sujet. L’infanticide, d’une part, et l’écriture de la lettre, d’autre part, sont les deux actes qui lui permettent de passer de l’état d’objet à l’état de sujet.
Medea’s myth is most of all about one woman’s will to claim loudly her subjectivity. This paper focuses on the quest of identity that motivates the main character of Mazarine Pingeot’s Le cimetière des poupées (2007) to commit an infanticide. In this French novel, the protagonist writes, from prison, a letter to her husband explaining her crime. She thus uses the narrative as a pretext to regain her own identity: object of other people’s discourse since her childhood, she takes over their words and adopts them to assert her existence as a subject. First, the infanticide, then, the writing appear to be the two acts that allow the protagonist to transform herself from object into subject.
Evelyne Ledoux-Beaugrand
Rémanences médéennes dans La réparation de Colombe Schneck
[ezcol_1third]Evelyne Ledoux-Beaugrand est chercheure postdoctorale à l’Université de Gand en Belgique. Ses recherches en cours portent sur les usages et les appropriations de la mémoire de la Shoah dans la littérature de l’extrême contemporain. Elle est l’auteure d’articles sur les écrits de femmes, publiés notamment dans Globe, Temps Zéro et Nottingham French Studies, et de l’ouvrage Imaginaires de la filiation. Héritage et mélancolie dans la littérature contemporaine des femmes (Éditions XYZ, 2013).
Le présent article se penche sur les rémanences de Médée dans les figures de « mère qui voulaient vivre » du récit La réparation de Colombe Schneck. À la fois enquête familiale et récit de la postmémoire de la Shoah, La réparation explore une histoire familiale indicible et honteuse en raison des mères sacrifiantes plutôt qu’auto-sacrificielles qui en sont les principales protagonistes. Les « mères qui voulaient vivre », dont la performance de la maternité se révèle non conforme aux représentations de la bonne maternité, sont abordées à la lumière du mythe de Médée, qui permet de jeter un regard sur les zones grises du maternel et de d’appréhender toute la complexité et l’ambiguïté des mères dès que celles-ci sont dégagées des antagonistes de la bonne et de la mauvaise mère.
This article examines Medea’s remanences through the figures of the “women mothers who wanted to live” in La réparation by Colombe Schneck. At the cross point of a family investigation and the exploration of Holocaust postmemory, La réparation revolves around a family story that is unspeakable and shameful because of the sacrificing instead of self-sacrificing mothers at its core. The “mothers who wanted to live” perform a motherhood that does not conform to the representations of the good mother. The myth of Medea helps us to look upon the grey zone of motherhood and understand how complex and ambiguous maternal figures can be as long as they are not seen through the frame of the antagonists of the good and the bad mother.
Meret Fehlmann
Göttin oder Trickster? – Facetten Medeas bei Robert Graves
[ezcol_1third]Meret Fehlmann est chercheuse et bibliothécaire scientifique à l’Université de Zurich. Elle a fait des études en folklore, littérature populaire et littérature allemande, et elle a complété une licence sur les figures féminines dans les romans arthuriens modernes avant de soutenir une thèse de doctorat sur le matriarcat, publiée en 2011 sous le titre Die Rede vom Matriarchat. Zur Gebrauchsgeschichte eines Arguments. Ses recherches et publications portent sur la littérature populaire, le matriarcat et la réception de l’Antiquité. De plus, elle est co-éditrice de la revue open-access kids+media (http://www.kids-media.uzh.ch).
Médée figure au premier plan dans certaines des œuvres de Robert Graves. Ainsi est-elle un des personnages principaux dans son roman The Golden Fleece (1944, une re-narration de la saga des Argonautes). Ce roman peut être lu comme ouverture de sa grande œuvre The White Goddess. Cette œuvre, comme The Golden Fleece, traite de la relation de la déesse avec son adorateur masculin. En échange du don de la poésie, la déesse blanche demande ultimement la mort du mâle. D’une part, il est possible d’interpréter la figure de Médée du roman The Golden Fleece comme une sorte de précurseur de la déesse blanche de la poésie. D’autre part, la Médée présentée dans The Golden Fleece se caractérise aussi comme une figure de « trickster » (filou).
Medea figures in some of the works of Robert Graves. She is one of the main characters in his retelling of the saga of the Argonauts, The Golden Fleece (1944). This book can be read as precursor to his great work, The White Goddess (1948). Both books deal with the relation between the poet and the white goddess or Muse. The white goddess gives the gift of poetry, but in the end asks the death of her male worshipper. On the one hand, it is possible to interpret The Golden Fleece’s Medea as a predecessor of the white goddess; on the other hand, this Medea resembles also the figure of the trickster.
Clément Courteau
Le triomphe du néant : exils d’une Médée-frontière
[ezcol_1third]Littéraire autodidacte, Clément Courteau pratique l’acupuncture à Montréal et termine un baccalauréat à l’Université McGill en attendant la publication de son premier roman. Son principal champ d’intérêt est la configuration sociale contemporaine et la manière dont les œuvres littéraires la reflètent dans leur architecture. Il s’intéresse pour cela à l’émergence de l’hypertextualité comme médium d’expression du flux tendu qui caractérise le capitalisme contemporain. Gagnant 2011 du Concours Philosopher, il a collaboré aux revues Hors-d’Œuvre, Postures et Études francophones.
L’article explore Médée, poème enragé, l’adaptation théâtrale récente du mythe de Médée par l’haïtien Jean-René Lemoine, afin d’y découvrir des pistes pour une lecture contemporaine du mythe dans laquelle la figure de Médée n’est plus seulement vouée à l’infanticide, mais devient un personnage beaucoup plus complexe dont les principales caractéristiques sont l’amour et son complément obligé, l’exil. La Médée de l’exil, qui tue ses enfants par noyade, se rapproche de notre époque en ce qu’elle entretient une conception atmosphérique et environnementale de l’amour. La comparaison entre elle et des récents cas d’infanticides au Québec nous éclaire sur la place de la figure de Médée dans le capitalisme actuel, celui de la crise.
The paper explores Médée, poème enragé, the recent theatrical adaptation of the myth of Medea by the Haitian director and playwright Jean-René Lemoine, in order to pursue paths towards a contemporary lecture of the myth, in which Medea is not entirely dedicated to infanticide but becomes a complex character whose main characteristics are her love for Jason and its obligatory counterpart: exile. The exiled Medea, who kills her children by drowning them, is close to us because of her atmospheric and environmental approach towards love. The parallel lecture of this play with recent infanticide cases in Quebec sheds light on the role of Medea as a figure in the contemporary crisis of capitalism.
Créations
Nelly Sanchez
Médée dans l’espace
Spécialiste du roman féminin français, auteure notamment d’une thèse sur L’Image de l’homme dans les écrits romanesques de Rachilde et de Colette, professeur de français dans le Sud de la France, Nelly Sanchez est aussi co-fondatrice de l’Association des Amis de Lucie Delarue-Mardrus.
Elle réalise également des collages d’inspiration surréaliste publiés dans différentes revues. Ses œuvres ont été exposées en France, en Italie et en Russie. Son univers est à découvrir sur www.nellysanchez.fr.
Caroline Hogue
Rencontre
Caroline Hogue termine son baccalauréat en Littératures de langue française à l’Université de Montréal, au cours duquel elle a passé un an à l’Université Paul Valéry de Montpellier. Elle entamera une maîtrise en janvier 2016, sous la direction d’Andrea Oberhuber ; son mémoire portera sur la tauromachie comme représentation de l’écriture chez Michel Leiris et Ernest Hemingway.
Jean Monamy
Mettre en scène une figure contemporaine : la première Médée du théâtre français !
Ex-professeur de Lettres et Art Dramatique en lycée et à l’UBS de Lorient, Jean Monamy a publié notamment : L’usinage à Béhar, (M’rM’r, No 10, 2008), Pourquoi Klossowski met-il en scène des formes scabreuses de sexualité féminine (2009), La révolte d’Iphicrate […] un modèle de l’art du simulâcre[…], (2010).
Pour CHTO compagnie, il met en scène des figures féminines rebelles : Chto, interdit aux moins de 15 ans, (2010), La Pierre fendue, (2012), LAURE / Fragments, (2014), et prépare La Médée (Fureurs & Fracas), dont il développe, ici, la « note d’intention ».
Laurent Herrou
Trois histoires courtes
Laurent Herrou est écrivain. Son travail dans le domaine de l’autofiction lui a ouvert les portes de revues internationales (Pylône et Ecritures en Belgique, Brèves et MuseMedusa au Québec, TowerJournal aux Etats-Unis, Hétérographe en Suisse, et D’ici là, Rue Saint-Ambroise et Monstre en France). Il a publié neuf livres en France. Son dernier opus est paru chez Jacques Flament sous le titre Le Bunker – Deuxième Témoignage en février 2015.
Léonore Brassard
Poupées Gigognes
Léonore Brassard est étudiante en Littératures de langue française à l’Université de Montréal. Elle travaille depuis septembre 2014 sur une maîtrise en recherche-création, sous la direction de Catherine Mavrikakis. Ses recherches portent sur le thème de la prostitution et de la performance dans la littérature contemporaine. Elle participe parallèlement à la revue littéraire Le pied, où elle se charge de l’édition web, et y publie sporadiquement.
Suzanne Jacob
Obéissances
Suzanne Jacob est romancière, poète, chroniqueure et essayiste. Prix Paris-Québec, prix du Gouverneur général pour le roman Laura Laur, prix de la revue Études Françaises pour La Bulle d’encre, prix du Gouverneur général pour La part de feu. Elle a reçu en 2008 le prix Athanase-David pour l’ensemble de son œuvre.
Révision : Alexandra Arvisais, Caroline Hogue, Pascale Joubi.
Mise en ligne : Mathieu Laflamme.